22

Juil

Flux de travail analogique et numérique : où en sommes-nous aujourd’hui ?

De nos jours, les flux de travail numériques sont de plus en plus présents dans les cabinets dentaires et les laboratoires dentaires (1). Le numérique offre des avantages cliniques et techniques que les méthodes traditionnelles ne pouvaient pas garantir dans le passé (2).

À titre d’exemple, la possibilité de superposer numériquement deux modèles d’arcades dentaires d’un même patient permet d’observer des différences, des changements et des schémas d’usure qui, auparavant, ne pouvaient être évalués que visuellement et de manière totalement arbitraire et subjective.

Cela a permis non seulement des comparaisons plus précises, mais aussi le développement de nouvelles procédures et de nouveaux flux de travail, tels que le montage croisé virtuel (« virtual cross mounting »), une technique utile pour maintenir la même relation intermaxillaire lors du passage d’une prothèse amovible complète à une prothèse fixe implanto-portée (3,4).

<

Ces superpositions virtuelles permettent également de visualiser les mouvements des dents au cours du traitement orthodontique, en vérifiant la correspondance entre l’évolution clinique et la configuration virtuelle (5).

Quand l’analogique reste irremplaçable en dentisterie

Il existe cependant encore des domaines où il est difficile de remplacer l’analogique par le numérique en raison de limitations technologiques et fonctionnelles (6).

C’est notamment le cas des prothèses amovibles, où, comme nous l’avons expliqué plus en détail dans nos articles précédents (7,8), les empreintes sont actuellement plus fiables lorsqu’elles sont prises à l’aide de techniques analogiques et de matériaux ayant différentes viscosités et consistances. En effet, ces derniers s’adaptent mieux aux tissus mous en cas d’anodontie complète, distendant correctement les muqueuses sur les bases osseuses sous-jacentes (9). En outre, l’enregistrement de la relation intermaxillaire chez ces patients n’est pas encore possible uniquement à l’aide de scanners intra-oraux.

Plusieurs techniques ont été proposées pour surmonter ces difficultés dans les cas de prothèses sur implants.  Par exemple, en utilisant certaines références sur le palais, ou le palais lui-même, il est possible d’associer deux scans successifs ; l’un avec la prothèse provisoire in situ et l’autre avec les « scan-bodies » (repères de numérisation) (10). Cela permet au technicien de fabriquer une prothèse implanto-portée conservant l’occlusion de la prothèse provisoire précédente.

D’autres techniques impliquent l’utilisation de scan-bodies équipés de piliers spéciaux qui peuvent être ajustés à différentes hauteurs, facilitant ainsi l’appariement des arcades lors de l’enregistrement numérique de la morsure (11). 

En ce qui concerne l’articulation des mâchoires totalement édentées avec des prothèses amovibles, l’imagerie d’un bloc de mastic de silicone placé entre les arcades à la dimension verticale souhaitée a été proposée (12,13). Ce bloc peut ensuite être numérisé et associé à des numérisations intra-orales ou à des numérisations d’empreintes conventionnelles (12,13).

Il peut également être utilisé pour articuler les modèles en plâtre des arcades respectives, permettant ainsi au technicien de commencer à travailler à partir d’une dimension verticale initiale.

Le bloc de mastic peut également être marqué par des lignes de référence, telles que la ligne médiane, celle du sourire ou des canines, pour guider le positionnement des dents antérieures, qui pourra ensuite être revu ou confirmé cliniquement si nécessaire (13).

La combinaison de l’analogique et du numérique en dentisterie

Une autre procédure où la combinaison de l’analogique et du numérique s’avère gagnante est celle utilisant les « Wagner Try-in ». Ceux-ci sont constitués de bases imprimées en 3D et de dents préformées fixées à la base par de la cire. Contrairement aux montages en cire traditionnels, ils ne sont pas réalisés sur des modèles physiques en plâtre convenablement dégagés dans les zones en contre-dépouille afin qu’ils ne soient pas endommagés par l’insertion et le retrait continus des dispositifs, mais sont entièrement produits numériquement.

Ainsi, les contre-dépouilles peuvent être exploitées, rendant le dispositif plus stable en bouche. De plus, le fait que les dents soient fixées à la base imprimée par de la cire permet de modifier librement leur position et d’en évaluer l’esthétique plus efficacement par rapport aux prototypes imprimés en un seul bloc dans une seule couleur blanche (14).

En ce qui concerne la fabrication de prothèses amovibles, nous pouvons affirmer que les techniques numériques, et en particulier le fraisage, sont avantageuses car elles ne sont pas affectées par la contraction de polymérisation, la porosité et la perte de monomère typiques des prothèses amovibles fabriquées avec des techniques analogiques (15,16).

Cependant, l’esthétique des dents fraisées ou imprimées, moins naturelles que les dents préformées, peut constituer un problème en raison de différences de translucidité dans le sens vestibulo-lingual. Une solution hybride, combinant une base fraisée avec des dents préformées, a récemment été proposée dans une étude et pourrait offrir une alternative en attendant que les matériaux de fraisage ou d’impression soient perfectionnés sur le plan esthétique (13).

Cela dit, cette solution comporte aussi des inconvénients, notamment le risque de désinsertion des éléments dentaires individuels de l’alvéole dans laquelle ils sont collés.

Intégration analogique-numérique dans les cabinets dentaires : la voie la plus efficace

En conclusion, nous pouvons dire que l’intégration entre l’analogique et le numérique constitue aujourd’hui la stratégie la plus efficace pour obtenir des résultats cliniques prévisibles et de qualité, notamment dans des domaines complexes tels que les prothèses totales amovibles.

Bien que le numérique offre des outils pour simplifier, documenter et améliorer les flux de travail, certaines phases restent à ce jour l’apanage des techniques traditionnelles pour des raisons de fiabilité et d’adaptabilité aux situations cliniques.


Bibliographie :

Images extraites de « CAD-CAM complete digital dentures: An improved clinical and laboratory workflow » – https://doi.org/10.1016/j.prosdent.2024.11.016

1.            Revilla-Leon M, Frazier K, da Costa JB, Kumar P, Duong ML, Khajotia S, et al. Intraoral scanners: An American Dental Association Clinical Evaluators Panel survey. J Am Dent Assoc. 2021 Aug 1;152(8):669-670.e2.

2.            Robles-Medina M, Romeo-Rubio M, Salido MP, Pradíes G. Digital Intraoral Impression Methods: an Update on Accuracy. Curr Oral Health Rep. 2020 Dec;7(4):361–75.

3.            Lepidi L, Galli M, Grammatica A, Joda T, Wang HL, Li J. Indirect Digital Workflow for Virtual Cross-Mounting of Fixed Implant-Supported Prostheses to Create a 3D Virtual Patient. J Prosthodont. 2021 Feb;30(2):177–82.

4.            Tallarico M, Galiffi D, Scrascia R, Gualandri M, Zadrożny Ł, Czajkowska M, et al. Digital Workflow for Prosthetically Driven Implants Placement and Digital Cross Mounting: A Retrospective Case Series. Prosthesis. 2022 Sep;4(3):353–68.

5.            de Leotard A, Le Norcy E. Comparison of dental movements in digital setups created by orthodontists and ‘3shape design service®’ engineers: A cross-sectional study. Int Orthod. 2024 Dec;22(4):100919.

6.            Revilla-León M, Lanis A, Yilmaz B, Kois JC, Gallucci GO. Intraoral digital implant scans: Parameters to improve accuracy. J Prosthodont. 2023 Dec;32(S2):150–64.

7.            zhermack. Impronte Dentali Analogiche e Digitali a Confronto [Internet]. [cited 2025 Jun 21]. Available from: https://magazine.zhermack.com/it/studio/impronta-digitale-vs-impronta-analogica-quando-usare-luna-e-quando-laltra/

8.            zhermack. Impronta analogica e digitale su paziente edentulo: review della letteratura [Internet]. [cited 2025 Jun 21]. Available from: https://magazine.zhermack.com/it/studio/impronta-analogica-vs-digitale-su-paziente-edentulo/

9.            Chebib N, Kalberer N, Srinivasan M, Maniewicz S, Perneger T, Müller F. Edentulous jaw impression techniques: An in vivo comparison of trueness. J Prosthet Dent. 2019 Apr;121(4):623–30.

10.         Chochlidakis K, Romeo D, Ercoli C, Papaspyridakos P. Complete Digital Workflow for Prosthesis Prototype Fabrication with the Double Digital Scanning (DDS) Technique: A Prospective Study on 16 Edentulous Maxillae. Journal of Prosthodontics [Internet]. 2022 [cited 2025 Apr 19];31(9):761–5. Available from: https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/jopr.13569

11.         Nuytens P, Grande F, Li J, Lepidi L. Maxillomandibular relationship and virtual facebow integration in complete-arch intraoral implant scan: A novel clinical technique. J Prosthodont. 2024 Mar 20;

12.         Srinivasan M, Kalberer N, Naharro M, Marchand L, Lee H, Müller F. CAD-CAM milled dentures: The Geneva protocols for digital dentures. J Prosthet Dent. 2020 Jan;123(1):27–37.

13.         Grande F, Pavone L, Molinelli F, Mussano F, Srinivasan M, Catapano S. CAD-CAM complete digital dentures: An improved clinical and laboratory workflow. J Prosthet Dent. 2024 Dec 28;S0022-3913(24)00821-7.

14.         Wagner SA, Kreyer R. Digitally Fabricated Removable Complete Denture Clinical Workflows using Additive Manufacturing Techniques. J Prosthodont. 2021 May;30(S2):133–8.

15.         AlHelal A, AlRumaih HS, Kattadiyil MT, Baba NZ, Goodacre CJ. Comparison of retention between maxillary milled and conventional denture bases: A clinical study. J Prosthet Dent. 2017 Feb;117(2):233–8.

16.         Grande F, Tesini F, Pozzan MC, Zamperoli EM, Carossa M, Catapano S. Comparison of the Accuracy between Denture Bases Produced by Subtractive and Additive Manufacturing Methods: A Pilot Study. Prosthesis. 2022 Mar 28;4(2):151–9.


Souhaitez-vous plus d’informations sur les produits et solutions Zhermack Dental?

Contactez-nous