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Juin

La 3D dans le laboratoire dentaire : pourquoi, quelles applications et quels avantages?

La révolution numérique, avec l’introduction des technologies 3D, a profondément transformé le laboratoire dentaire. L’expression « technologies 3D » englobe l’ensemble des outils, matériels et logiciels, qui font partie intégrante du flux de travail CAO-FAO (Conception assistée par ordinateur – Fabrication assistée par ordinateur) (1–3).

Aujourd’hui, les imprimantes 3D, les logiciels de CAO/FAO et les scanners de paillasse sont des outils courants dans de nombreux laboratoires. Ils offrent de nouvelles possibilités opérationnelles, une précision accrue et une gestion plus efficace des flux de travail que jamais auparavant (4). Grâce à ces technologies de CAO/FAO et à d’autres, il est désormais possible de concevoir et de fabriquer des dispositifs prothétiques, orthodontiques, gnathologiques, chirurgicaux et implantaires (5–7).

Cependant, l’intégration des technologies 3D n’est pas toujours réalisable et doit être évaluée en fonction de l’application clinique spécifique, des matériaux utilisés et du choix entre une production interne ou externalisée, en particulier pour les fabrications métalliques (8,9).

Les phases du flux de travail 3D dans un laboratoire dentaire

Dans le laboratoire dentaire, l’utilisation de la technologie 3D se décline en plusieurs phases du flux de travail (10). La première phase est l’acquisition, qui peut être réalisée soit par empreinte numérique directement prise en cabinet avec un scanner intra-oral, soit par une empreinte traditionnelle ou un modèle en plâtre, numérisé ultérieurement via un scanner de paillasse.

Le fichier STL généré constitue le point de départ pour la modélisation du dispositif prescrit par le dentiste. Grâce au logiciel de CAO, la conception numérique du dispositif demandé est ensuite réalisée en travaillant directement sur le fichier STL acquis. Il est alors possible de concevoir des couronnes, des bridges, des structures implantaires, des guides chirurgicaux, des gouttières et des appareils orthodontiques.

Une fois le projet finalisé, la phase de fabrication commence, qui peut être réalisée à l’aide de technologies de FAO soustractives, comme le fraisage, ou additives, via l’impression 3D (11,12).

Cette approche présente un double avantage : i) d’une part, elle permet de réduire les délais et les coûts liés aux étapes manuelles, telles que la modélisation en cire ; ii) d’autre part, elle garantit une standardisation du produit en termes de caractéristiques mécano-chimiques, avec une forme parfaitement reproductible à partir du fichier STL (3).

Laboratoire dentaire 3D : production interne ou externalisée

Pour toutes ces phases opérationnelles, en particulier celles de FAO, le laboratoire dentaire peut choisir de faire appel à des centres de production externes (fabrication industrielle) ou de conserver la production en interne (13). Ce choix est particulièrement pertinent pour la manipulation de matériaux métalliques (9).

En effet, les métaux sont plus difficiles à exploiter avec un flux numérique au sein du laboratoire, car ils nécessitent des technologies avancées et très coûteuses comme le «Selective Laser Melting» (SLM ou DMLS), ainsi que des environnements contrôlés pour le traitement post-impression (9,14). Même avec les techniques soustractives, le fraisage des métaux présente des défis : il s’agit d’une opération particulièrement abrasive pour les fraises, qui se détériorent rapidement.

Avantages et inconvénients de la production en interne

Aujourd’hui, certains métaux « mous », (chrome-cobalt), sont plus faciles à fraiser avec des machines standards, mais nécessitent un traitement de frittage ultérieur. Ce dernier entraîne un rétrécissement dimensionnel d’environ 10 %, qui doit être soigneusement pris en compte lors de la phase de conception (15).

Pour cette raison, de nombreux laboratoires préfèrent externaliser la fabrication des structures métalliques vers des centres de fraisage ou des services industriels spécialisés. Ces centres disposent d’équipements de haute précision, souvent plus coûteux et complexes à entretenir pour un laboratoire de taille moyenne ou petite, et garantissent des standards de qualité élevés avec des délais compétitifs.

En revanche, la production en interne s’avère plus avantageuse pour d’autres types de procédés, notamment pour l’impression de modèles 3D, de dispositifs en résine (comme les dispositifs provisoires ou les gouttières) ou de guides chirurgicaux personnalisés (16). Les céramiques sont également bien exploitables en laboratoire. La zircone, par exemple, est usinée pendant la phase de pré-frittage, où elle possède une consistance très tendre, proche du plâtre. Après le frittage, elle subit également une réduction dimensionnelle (d’environ 20 %), avant d’être finalisée par le prothésiste (17,18).

De plus, avec la diffusion d’imprimantes 3D haute performance et de matériaux hybrides composite/céramique, de plus en plus fiables et certifiés, de nombreux laboratoires parviennent à obtenir des résultats cliniquement valides, notamment pour la fabrication directe d’œuvres définitives (19).

Utilisation du modèle imprimé en 3D

Une question clé demeure l’usage du modèle imprimé en 3D (20) : quand est-il réellement nécessaire et quand peut-il ne pas être utilisé ? La réponse dépend du type de travail et des matériaux utilisés. Certes, les modèles imprimés en 3D sont toujours utiles comme documentation médico-légale, outils de vérification et d’ajustement, comme répliques pour le patient ou comme supports de communication entre le cabinet dentaire, le laboratoire et même le patient.

En orthodontie, les modèles 3D sont la base du thermoformage des gouttières et de l’archivage numérique des cas, tandis qu’en implantologie, ils sont essentiels pour le contrôle de l’ajustement des prothèses sur implants pour des travaux complexes (21). Ils servent également à tester l’ajustement des gouttières chirurgicales en préparation d’une chirurgie guidée.

Dans les prothèses sur dents naturelles, les modèles imprimés en 3D sont particulièrement utiles lorsqu’un contrôle précis de l’occlusion et un ajustement passif sont nécessaires. Ils servent de références pour la finition, la vérification des contacts et l’évaluation esthétique. Les modèles imprimés en 3D peuvent aussi être employés pour fabriquer des gouttières permettant de réaliser des maquettes esthétiques directes (22).

Cependant, dans certains cas spécifiques, il est possible de travailler entièrement sans modèle, c’est-à-dire sans passer par l’impression du modèle (23). C’est le cas notamment des restaurations temporaires sur dents, des restaurations préliminaires et des restaurations permanentes sur implants simples ou multiples. Dans ces scénarios, le recours à des flux numériques sans modèle permet une gestion encore plus rapide avec des délais de livraison encore plus courts (24).

Avantages et limites des technologies 3D

En conclusion, les technologies 3D ont profondément transformé la manière dont le laboratoire dentaire travaille, apportant des avantages majeurs en termes de précision, rapidité et reproductibilité.

Cependant, pour tirer le meilleur parti de ces technologies, il est essentiel de bien comprendre leurs indications d’utilisation, les limites des matériaux, et d’équilibrer efficacement la production en interne et l’externalisation industrielle.

Ce n’est qu’ainsi que le laboratoire pourra offrir des dispositifs prothétiques et orthodontiques de haute qualité, répondant de manière efficace aux exigences cliniques actuelles et futures.


Bibliographie :

1.         Carneiro Pereira AL, Bezerra de Medeiros AK, de Sousa Santos K, Oliveira de Almeida É, Seabra Barbosa GA, da Fonte Porto Carreiro A. Accuracy of CAD-CAM systems for removable partial denture framework fabrication: A systematic review. J Prosthet Dent. 2020 Mar 5;

2.         Papadiochou S, Pissiotis AL. Marginal adaptation and CAD-CAM technology: A systematic review of restorative material and fabrication techniques. J Prosthet Dent. 2018 Apr;119(4):545–51.

3.         Alghazzawi TF. Advancements in CAD/CAM technology: Options for practical implementation. J Prosthodont Res. 2016 Apr;60(2):72–84.

4.         Alghauli MA, Aljohani W, Almutairi S, Aljohani R, Alqutaibi AY. Advancements in digital data acquisition and CAD technology in Dentistry: Innovation, clinical Impact, and promising integration of artificial intelligence. Clinical eHealth. 2025 Dec;8:32–52.

5.         Grande F, Pavone L, Molinelli F, Mussano F, Srinivasan M, Catapano S. CAD-CAM complete digital dentures: An improved clinical and laboratory workflow. J Prosthet Dent. 2024 Dec 28;S0022-3913(24)00821-7.

6.         Grande F, Ortensi L, Ortensi M, Catapano S. Prosthetic implant rehabilitation using the scan-analog protocol: a clinical case. Dental Cadmos. 2023 Oct;91(08):682.

7.         Pozzi A, Tallarico M, Moy PK. Four-implant overdenture fully supported by a CAD-CAM titanium bar: A single-cohort prospective 1-year preliminary study. J Prosthet Dent. 2016 Oct;116(4):516–23.

8.         Revilla-León M, Özcan M. Additive Manufacturing Technologies Used for Processing Polymers: Current Status and Potential Application in Prosthetic Dentistry. J Prosthodont. 2019 Feb;28(2):146–58.

9.         Revilla-León M, Meyer MJ, Özcan M. Metal additive manufacturing technologies: literature review of current status and prosthodontic applications. Int J Comput Dent. 2019;22(1):55–67.

10.       Masri R, Driscoll C. Odontoiatria digitale: Presupposti teorici e applicazioni cliniche. Edra; 2017. 610 p.

11.       Dawood A, Marti Marti B, Sauret-Jackson V, Darwood A. 3D printing in dentistry. Br Dent J. 2015 Dec;219(11):521–9.

12.       Christensen GJ. Impressions Are Changing: Deciding on Conventional, Digital or Digital Plus In-Office Milling. J Am Dent Assoc. 2009 Oct 1;140(10):1301–4.

13.       Grenade C, Mainjot A, Vanheusden A. Fit of single tooth zirconia copings: comparison between various manufacturing processes. The Journal of Prosthetic Dentistry [Internet]. 2011 Apr 1 [cited 2025 May 1];105(4):249–55. Available from: https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0022391311600401

14.       Zhou Y, Dong X, Li N, Yan J. Effects of post-treatment on metal-ceramic bond properties of selective laser melted Co-Cr dental alloy. Part 1: Annealing temperature. J Prosthet Dent. 2023 Apr;129(4):657.e1-657.e9.

15.       Taşın S, Turp I, Bozdağ E, Sünbüloğlu E, Üşümez A. Evaluation of strain distribution on an edentulous mandible generated by cobalt-chromium metal alloy fixed complete dentures fabricated with different techniques: An in vitro study. J Prosthet Dent. 2019 Jul;122(1):47–53.

16.       Reich S, Berndt S, Kühne C, Herstell H. Accuracy of 3D-Printed Occlusal Devices of Different Volumes Using a Digital Light Processing Printer. Appl Science. 2022 Jan;12(3):1576.

17.       Nakamura T, Nakano Y, Usami H, Okamura S, Wakabayashi K, Yatani H. In vitro investigation of fracture load and aging resistance of high-speed sintered monolithic tooth-borne zirconia crowns. J Prosthodont Res. 2020 Apr;64(2):182–7.

18.       Ohkuma K, Kameda T, Terada K. Five-axis laser milling system that realizes more accurate zirconia CAD/CAM crowns by direct milling from fully sintered blocks. Dent Mater J. 2019 Feb 8;38(1):52–60.

19.       Mangano FG, Cianci D, Pranno N, Lerner H, Zarone F, Admakin O. Trueness, precision, time-efficiency and cost analysis of chairside additive and subtractive versus lab-based workflows for manufacturing single crowns: An in vitro study. J Dent. 2024 Feb;141:104792.

20.       Choi JW, Ahn JJ, Son K, Huh JB. Three-Dimensional Evaluation on Accuracy of Conventional and Milled Gypsum Models and 3D Printed Photopolymer Models. Materials. 2019 Jan;12(21):3499.

21.       Jin G, Shin SH, Shim JS, Lee KW, Kim JE. Accuracy of 3D printed models and implant-analog positions according to the implant-analog–holder offset, inner structure, and printing layer thickness: an in-vitro study. J Dent. 2022 Oct 1;125:104268.

22.       Garcia PP, da Costa RG, Calgaro M, Ritter AV, Correr GM, da Cunha LF, et al. Digital smile design and mock-up technique for esthetic treatment planning with porcelain laminate veneers. J Conserv Dent. 2018;21(4):455–8.

23.       Piscopo M, Grande F, Catapano S. Full Digital Workflow for Prosthetic Full-Arch Immediate Loading Rehabilitation Using OT-Bridge System: A Case Report. Prosthesis. 2022 Jun;4(2):213–23.

24.       Stanley M, Paz AG, Miguel I, Coachman C. Fully digital workflow, integrating dental scan, smile design and CAD-CAM: case report. BMC Oral Health. 2018 Aug 7;18(1):134.


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